Les acteurs des musiques actuelles du 93 sonnent l’alerte

Les acteurs des musiques actuelles du 93 sonnent l’alerte

 

Hilaire Penda, fondateur des Rares Talents et musicien hors pair, nous a quitté. 

Un hommage public organisé par la Mairie de Montreuil et Rares Talents aura lieu jeudi 29 novembre à 19h00 au Théâtre Berthelot de Montreuil.

Avec lui, nous perdons un compagnon de route et de militance, nous perdons une de ces figures phare, qui a tant travaillé pour faire du territoire du 93 un port d’attache où se sont arrimés de nombreux projets de musiques actuelles, un point d’ancrage ouvert sur le monde, nourrit une incroyable richesse culturelle et musicale, une caisse de résonance dont l’écho se fait entendre bien au-delà des périphériques. Hilaire Penda a tant travaillé pour que cette polyphonie vive, pour qu’elle rebondisse de lieux en lieux. Nous, les lieux de musiques actuelles du 93, y travaillons encore tous les jours. Mais notre souffle se fait court, et nous affrontons trop de vents contraires.

Il y a celles et ceux qui ont déjà disparu et que nous n’oublierons pas : le Café Culturel de Saint-Denis qui n’a pas été accompagné à hauteur de son histoire et malgré son implantation dans le territoire,  Canal 93 de Bobigny et le Cap d'Aulnay-Sous-Bois, deux fleurons de la culture des musiques actuelles se transforment à vue d’oeil en autre chose...

Il y a celles et ceux qui ont du réduire la voilure en débarquant des collègues, permanents ou équipes artistiques, qui sont le cœur de nos lieux: le Café la Pêche et les Instants Chavirés de Montreuil, le Deux Pièces Cuisine du Blanc-Mesnil, le Triton des Lilas, le Théâtre des Malassis de Bagnolet, Houdremont scène conventionnée de la Courneuve, ou encore Mains d’œuvres qui est malmené par la ville de Saint-Ouen depuis 2014. Il y a aussi nos partenaires : l’Atelier, l'ARIAM et puis Arcadi qui s’effacent avec nos ressources et celles des artistes que nous voyons se précariser sous nos yeux.

Il y a celles et ceux dont les horizons ne sont pas meilleurs : la Lutherie Urbaine de Bagnolet qui ne sait plus comment se réinventer, le CECB qui ne peut fonctionner sans aides à l’emploi et qui se prépare à affronter une destruction de ses locaux et une relocalisation pour les Jeux Olympiques. 


Il y a celles et ceux qui résistent et qui s'en sortent sans trop d'encombre, mais pour combien de temps ? 
 

Tous nos adhérents sont fragilisés, nos projets sont contraints, notre structure mutualisée, le MAAD 93, a dû être intégralement repensée et renouvelée pour se préserver et continuer à pouvoir exister, grâce à ceux qui nous soutiennent encore : La DRAC Île de France, Le Conseil Départemental de Seine Saint Denis, les mécènes, l'Adami, la Sacem et la SPEDIDAM.

Il faut accepter de faire le deuil de notre ami, mais nous ne ferons pas le deuil de nos projets. Malgré ces difficultés, nous tenons, nous résistons, nous nous adaptons, nous essayons de ne pas plier. Nous ne comprendrons pas ces mutations silencieuses tant qu’elles ne sont pas pour le meilleur.

Il nous faut renforcer nos alliances, il faut que soit entendue la place indispensable de nos projets et de nos valeurs sur le territoire du Grand Paris, composer en commun, ne surtout pas nous opposer les un.e.s aux autres, contribuer chacun.e à une métropole plus vertueuse et contributive. Lieux, musicien.n.es, habitant.e.s de Seine-Saint-Denis : il nous faut redoubler d’efforts et de soutien mutuel pour barrer la route à la spéculation immobilière qui traite nos lieux comme d’encombrantes anomalies urbaines. Contrer les industries culturelles prédatrices qui arasent les reliefs précieux de nos diversités. Affronter la logique lucrative de marché qui cerne et menace nos services publics culturels, éducatifs et de santé, autant que nos projets non-lucratifs et d’intérêt général, dans une chasse effrénée au moindre gibier-niche pour de nouvelles conquêtes financières. 

Nous sommes convaincu.e.s de la richesse de nos projets. Les usager.e.s de nos lieux, professionnel.le.s comme amateur.e.s, sont convaincu.e.s de la place qu’ils doivent occuper dans leur vie et sur leur territoire. 

Nous avons besoin de renfort : nous avons besoin du soutien des politiques publiques pour continuer à faire vivre cette polyphonie si précieuse.

Pour Le MAAD 93

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